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Le Chant de la Licorne – Extrait 2, pages 125 à 127  (partie 3 : Compagnons de l’Aube des Merveilles)

« Plus belle que la rosée nouvelle étincelant des feux du Soleil du matin… »

Pour l’appeler, la poésie marchait toujours, tout du moins si prononcée avec la sincérité la plus amoureuse. Ce qui était le cas de la mienne. J’étais, en quelque sorte, toujours si profondément touché et si joyeusement ébloui par sa venue qu’il m’était tout naturel de parler du cœur. Celui-ci s’apprêtait d’ailleurs à rayonner de plus en plus au fur et à mesure de l’attente qui s’ensuivait…

« Tu maîtrises l’intonation du petit poulain, sais-tu ? »

Je souris. La douceur qui infusait sa voix me remuait toujours autant. De sa bouche, je pouvais tout entendre. Elle avait une si merveilleuse façon de traduire en beauté tout ce qu’elle évoquait…

« Pour toi, je maîtriserais l’intonation muette d’un Paon-du-jour en butinage ! »

Je m’imprégnais de sa lumière. Trouver l’amour d’une licorne est proprement indicible. Son étreinte de douceur et de pureté dépassait les mots comme un goéland l’écume bondissante. À la mesure d’un soleil vu de l’intérieur, la description n’était pas abordable. C’était une bénédiction de tous les instants. Plus encore, sa présence matérialisait la félicité la plus tangible, comme si l’aura d’un cœur de licorne immergeait dans un océan d’ambroisie.

« Petit pégase butineur », taquina-t-elle.

J’avais beaucoup de mal à ne pas m’agenouiller devant tant de grâce lorsque son petit côté si doucement et si joliment taquin illuminait son merveilleux regard.

« Quand je suis avec toi, j’ai l’impression d’aimer l’Univers entier… » murmurai-je.

« Faudrait-il donc que j’appelle mes autres compagnes pour que cette impression se mue en certitude ? » demanda-t-elle.

« Mon impression était une certitude ! » m’exclamai-je avec le plus ardent désir de corriger mon inattention.

Elle sourit.

« La simple impression, c’est si je sais que tu es quelque part mais pas aussi proche que maintenant », rajoutai-je avec conviction.

« Tu es toujours avec moi », affirma-t-elle.

J’hochai la tête, bien qu’en laissant subtilement sous-entendre que me trouver tête à corne avec elle était manifestement d’une magnificence supérieure.

« Aimer l’Univers est se souvenir qu’il est un. Aimer l’Univers, c’est tout simplement vouloir se rapprocher de lui dans cette perspective d’unité.

— À te voir, je veux bien le croire…

— Mais sans exception, n’est-ce pas ! »

J’hochai la tête à nouveau. C’était, bien entendu, la vision juste, celle que ma licorne devait espérer me voir prendre.

« C’est ainsi que se révèle l’imperfection des notions de Bien et de Mal, et la perfection de celle d’équilibre », suggérai-je, non pour instruire celle qui savait déjà tout mais pour lui prouver que j’étais bon élève.

« C’est ainsi que Bien et Mal doivent redevenir ce qu’ils doivent être en vérité : deux simples polarités en moteurs de nos évolutions », clarifia-t-elle.

Je la regardai avec enthousiasme. Si l’Univers avait fait la Licorne, alors on pouvait reprendre espoir en tout.

En sa présence, les notions de temps et d’espace perdaient leur réalité, comme s’il suffisait de chevaucher une licorne pour tenir la clef de chaque dimension et de chaque époque. De plus, avec un tel soleil à ses côtés, la nuit n’était plus même dissociable du jour. J’étreignis une nouvelle fois sa lumière, caressant ses formes qui s’effaçaient tout doucement de mon regard émerveillé, tandis que s’imposait à moi un sentiment des plus magnifiques…

 
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